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Il n’ y aura que du Sable
Survinrent les signes, en sommeil, en verdure, les points ou les étendues naissants, l’espace qui lie, abuse, surmonte, relie, tisse signe, croît, navigue, achève. De forge en forge, le soudain vrille sous les averses. A qui se penche vers nous, il n’ y aura que du sable, que le tournoiement des blessures, la vie même.
C’est comme pour courir, pour rire à l’enfance, aux rives du fleuve, à l’empreinte de ce qui nous envoûte, au cœur de ce qui nous hasarde dans l’ivresse des courants erratiques,
qui sort à peine de l’ombre, qui susurre calmement comme une mer règne sans limite.
Comme si rien de ce vertige, au bord, autour, ne transporte, ne figure, les plus extravagantes solutions. Anodine onde de doutes, glaneurs et frondeurs voisins des présences impérieuses. Sans frontière, parce que la question n’était pas là, vaguement inapte, elle est délaissée, initiée à l’à peu-près des étonnements. C’est un malheur de se mettre à l’écrit hors de ce qui sème l’ordre, rien ne permet l’errance, rien ne propose l’embrasement des confidences ni le défi de porter jusque soi l’ultime glissade vers un néant écarquillé.
De nouveau ce moment où tout est parfaitement cuisant, huileux, lentement, il débouche sur ses catastrophes troubles qui nous prennent. Tremblée qui nous ronge, émoi qui effleure le fugace, le désordre, la rigueur. L’aubaine est d’être toujours vivant, en vivant démesuré, en mutation par là où la vie se risque et refuse aliénation, par là où la mort l’invalide dans ses élans de générosités, dans les présences vivotantes, les silences volatiles. Bien plus encore, le manque d’audace et de maquis ne suffisent plus à envisager les possibles, les géométries troubles qui arpentent nos intuitions, notre vivre difficile à disposer d’un savoir déferlant alentour, dedans, entre, au sein, en des innombrables impatiences à chérir.
J’ entend nos pas, nos errements, leurs hésitations, leurs rumeurs, leurs secrets grouillements, hasardeuses écumes, illisibles désordres, l’écrire vivant en expédition, en tribu, en écorce, en enchevêtrement, aux lèvres des averses, en plusieurs, sans trajectoire, sans mesure. Comme de tout temps à confondre les récifs et les plus secrètes promenades quand nos cœurs n’ont plus à croire et que nos yeux ont fait le deuil de quelques chevelures éparses. Par quelques hautes fusions, troubler la paix sans cesse renouvelée, insidieuses attitudes qui invalident les possibles, s’alarment, se troublent, enténèbrent les choses, peuvent fuir, échapper, traverser nos bergères incertitudes, nos folles figures poussées au vent sans ornements.
Avec le temps rien à desceller parmi vieux visages et frusques racornis, rien ne règne calmement, rien ne peut abdiquer, à peine tendrement comme l’ombre ou davantage l’usure et ses clartés qui inégalement nous leurrerons. Mais nous n’avons pu élevés nos propres récits et trouver la demeure qui leurs convient ni trouver cité pour leurs paisibles apostrophes.
Faut-il panser l’oubli et emplir nos schèmes d’ Hommes intransigeants le long de ce voyage aux portes brisées et où la captivité des corbeaux n’ incitent que les nuit à modifier, hanches et ombres, dunes, chemins et traces ? Si l’oubli nous porte aux marches de ses histoires, aux fins heureuses de ses contes, aux dernières défaites de ses horizons, aux derniers étrangers, qui ont emportés la mer et le ciel, que nous reste –il dans le temps ? Le vin du pays, la mer du sud, les compagnes fiévreuses, l’innocence de nos silences, l’herbe de nos mensonges, le vent de nos doutes et des mains douteuses et lointaines dans nos rêves.
Toutes les peines que donnent la vie et la mort, conduisent à respirer, à croire, mais davantage à reprendre souffle et ouvrir sans limites aux vieux visages des fleuves, à la fatigue des sables, vers ce qui vaille la peine et qui, peut-être, règne à peine dans l’ombre comme une fluviale usure…comme un sablier n’étant plus..qu’un rire emporte lors d’un de ces voyages.
Tarek Essaker
Liège
Illustration de Robert Varlez.
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